Le lien entre la santé dentaire et les maladies chroniques

Vous vivez avec une maladie chronique ou auto-immune. Vous avez peut-être déjà travaillé sur l’alimentation, le sommeil, le stress, les émotions. Mais une zone clé reste souvent ignorée : la bouche.

La bouche n’est pas isolée du reste du corps. Elle dialogue en permanence avec votre système immunitaire, votre circulation sanguine et votre digestion. Lorsqu’elle est fragilisée, elle peut entretenir une inflammation de fond qui épuise un organisme déjà sensible.

Cet article a pour objectif de vous donner une vision claire et accessible :

  • pourquoi la bouche joue un rôle important dans les maladies chroniques et auto-immunes,
  • quelles sont les zones de vigilance à connaître,
  • et surtout, quelles actions concrètes pour améliorer votre santé.

La bouche est un espace vivant : microbiote oral, gencives, muqueuses, racines dentaires, os de la mâchoire. Elle concentre des milliers de terminaisons nerveuses et un réseau sanguin riche, qui la relient directement au reste du corps.

Un microbiote buccal équilibré agit comme une barrière protectrice. Mais lorsqu’il est perturbé, certaines bactéries pathogènes prennent le dessus. Elles produisent des toxines capables de franchir les barrières locales, diffusant ensuite par la circulation sanguine.

👉 Conséquence : une petite inflammation locale dans la bouche peut devenir une inflammation systémique, affectant l’ensemble du corps.

C’est ce qu’on appelle souvent une inflammation de bas bruit : invisible, chronique, mais qui alimente les maladies chroniques et auto-immunes.

La parodontite est une maladie des gencives et des tissus qui soutiennent les dents. Elle commence souvent par une simple gingivite (gencives rouges, qui saignent facilement), puis peut évoluer vers une destruction progressive de l’os autour des dents.

C’est une affection très fréquente : une grande partie des adultes en est atteinte, parfois sans le savoir.

Pourquoi c’est un problème majeur pour les maladies chroniques ?

  • Les bactéries présentes dans les poches parodontales passent dans la circulation sanguine et se retrouvent dans d’autres organes.
  • L’inflammation locale des gencives alimente en continu la production de cytokines, des molécules inflammatoires qui pèsent sur tout le corps.
  • Le lien avec le diabète est bien établi : une parodontite complique l’équilibre glycémique, et un diabète déséquilibré fragilise les gencives.
  • Elle est associée à un risque accru de maladies cardiovasculaires, de complications de grossesse, de maladies respiratoires chroniques et de troubles auto-immuns.

Un signal simple à ne pas ignorer :

Des gencives qui saignent régulièrement ne sont pas “normales”. C’est déjà un signe que le système immunitaire est mobilisé en permanence.

👉 Dans le cadre d’une maladie chronique ou auto-immune, la parodontite agit comme un foyer inflammatoire permanent. La traiter ne sert pas seulement à protéger ses dents : c’est une manière de soulager l’organisme tout entier.

La bouche n’abrite pas seulement des tissus vivants. Elle peut aussi contenir des matériaux comme des plombages, des couronnes ou des implants. Ces éléments restent en contact permanent avec le corps, et certains peuvent devenir une charge supplémentaire pour un organisme déjà fragilisé.

Les anciens plombages gris, appelés amalgames, contiennent du mercure. Solides et peu coûteux, ils ont été utilisés pendant des décennies. Mais au fil du temps, ils libèrent de petites quantités de vapeur de mercure, qui passent dans la circulation sanguine.

Le mercure est un métal lourd reconnu pour sa toxicité neurologique et rénale. Chez certaines personnes, l’organisme parvient à l’éliminer. Mais dans le contexte d’une maladie chronique ou auto-immune, où le corps est déjà sous pression, cette exposition peut aggraver la charge toxique et l’inflammation de fond.

Les couronnes contenant des métaux (alliages ou mélanges) peuvent générer des micro-courants électriques, appelés courants galvaniques. Ces phénomènes passent souvent inaperçus, mais ils ajoutent un stress permanent au terrain.

Les couronnes en céramique (zircone notamment) sont plus neutres. Elles ne conduisent pas l’électricité, interagissent peu avec l’organisme et sont de plus en plus utilisées comme alternative.

Les implants en titane, très répandus, sont globalement bien tolérés. Pourtant, chez certains patients, ils peuvent libérer de fines particules qui stimulent le système immunitaire en continu.

Les implants en céramique (zircone) sont plus récents. Ils sont considérés comme plus inertes, avec moins d’interactions électrochimiques. Le recul scientifique reste limité, mais ils apparaissent comme une piste prometteuse, surtout pour les terrains fragilisés.

👉 L’essentiel à retenir : tous ces matériaux ne posent pas problème pour tout le monde. Mais pour une personne déjà fragilisée par une maladie chronique ou auto-immune, ils peuvent représenter une charge inflammatoire et immunitaire supplémentaire.

Certaines inflammations buccales ne se voient pas, ne font pas mal, et passent souvent inaperçues. Pourtant, elles peuvent entretenir une stimulation permanente du système immunitaire. On parle alors de foyers infectieux cachés.

Une dent est un tissu vivant, parcouru par un réseau de minuscules tubules. Lorsqu’elle est dévitalisée, le dentiste nettoie et scelle l’intérieur de la dent.

  • Si la dévitalisation est complète et bien réalisée, la dent reste stable.
  • Si elle laisse des micro-espaces, ceux-ci deviennent des refuges pour les bactéries. Comme la dent n’a plus de vascularisation, le système immunitaire ne peut plus y accéder. Résultat : une inflammation discrète mais persistante, invisible au quotidien, qui épuise le corps à petit feu.

👉 Chez une personne déjà fragilisée par une maladie chronique ou auto-immune, cette inflammation peut suffire à aggraver les symptômes.

Les cavitations sont des zones de l’os de la mâchoire qui ne cicatrisent pas correctement après une extraction (notamment les dents de sagesse). L’os peut rester mou, mal vascularisé, et devenir une poche contenant des bactéries et des toxines.

Certaines recherches pointent la présence de molécules inflammatoires spécifiques (comme les cytokines RANTES/CCL5) dans ces cavitations, associées à des troubles auto-immuns et à certaines formes de cancer.

Ces cavités invisibles à l’œil nu entretiennent une stimulation permanente du système immunitaire. Pour un organisme déjà fragile, c’est comme un feu de camp mal éteint qui continue de fumer en permanence.

Toutes les situations évoquées (parodontite, matériaux dentaires, foyers infectieux cachés…) ont un point commun : elles entretiennent une inflammation permanente.

Or, l’inflammation est le dénominateur commun des maladies chroniques et auto-immunes notamment : polyarthrite, MICI, lupus, diabète, fatigue chronique, fibromyalgie…

Dans les maladies auto-immunes, le système immunitaire est déjà hypersensible, en état d’alerte constant. Chaque foyer buccal qu’il soit visible comme une parodontite, ou caché comme une cavitation devient une stimulation de plus, qui entretient le cercle vicieux.


La bonne nouvelle, c’est qu’il existe des gestes simples et accessibles pour prendre soin de votre bouche et réduire la charge inflammatoire qui en découle. Pas besoin de tout transformer du jour au lendemain : chaque petit pas compte.

  • Brosser les dents après chaque repas avec une brosse souple et une technique douce.
  • Utiliser du fil dentaire ou des brossettes interdentaires une fois par jour.
  • Nettoyer la langue chaque matin avec un gratte-langue pour limiter le biofilm bactérien.
  • Boire régulièrement de l’eau pour maintenir une bonne salivation, essentielle à l’équilibre du microbiote oral.
  • Choisir un dentifrice sans agents irritants agressifs (tensioactifs moussants, fluor en excès, additifs chimiques).
  • Préférer des bains de bouche doux à base de plantes ou de solutions naturelles.
  • Limiter l’usage quotidien d’antiseptiques chimiques, qui perturbent le microbiote oral.
  • Réduire le sucre raffiné, carburant principal des bactéries pathogènes.
  • Soutenir la santé des gencives avec la vitamine C, indispensable à la cicatrisation et au collagène.
  • Optimiser l’immunité locale et générale avec la vitamine D et le zinc.
  • Favoriser une alimentation riche en antioxydants (fruits colorés, légumes, oméga-3) pour apaiser l’inflammation.

Certains symptômes méritent votre attention :

  • gencives qui saignent,
  • mauvaise haleine persistante,
  • goût métallique,
  • douleurs diffuses dans la mâchoire,
  • fatigue récurrente.

👉 Ces signaux ne sont pas anodins. Ils indiquent que votre bouche envoie un message, et qu’il est temps de l’écouter.

Certains dentistes dits “biologiques” ou “holistiques” tiennent compte du terrain global du patient. Ils sont attentifs aux matériaux utilisés, à la qualité des dévitalisations, aux cavitations, et à l’impact immunitaire de la santé buccale.

La bouche est bien plus qu’un détail de la santé. Elle influence directement l’équilibre immunitaire et inflammatoire, et peut peser lourd dans un terrain déjà fragilisé par une maladie chronique ou auto-immune.

Prendre soin de cet espace, c’est réduire une source possible d’inflammation, soulager l’organisme et renforcer ses défenses.

Chaque action compte : améliorer l’hygiène quotidienne, surveiller les signaux d’alerte, réfléchir aux matériaux en bouche, et consulter un praticien compétent si nécessaire.

👉 Prendre soin de la bouche, c’est soutenir l’équilibre du corps tout entier.

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